AN PAR AN, Chronique d'une jeunesse drouaise.
J'ai fait le pari de raconter une vie, annèe par année. La chronique d'une vie drouaise, ou plutôt d'une jeunesse
drouaise :de 1946 à 1967. Chaque semaine, une année....J'y raconte mon enfance à Dreux, mais je m'attache surtout à décrire tout ce que j'ai pu observer dans la vie drouaise de l'époque.
Les personnes, les lieux, l'histoire et les petites histoires drouaises, des portraits, des atmosphéres, des anecdotes. , bref, tout ce qui fait le sel d'une vie et fournit la mémoire
en souvenirs de toutes sortes..et que peut être certains Drouais reconnaîtront.. Pour vous permettre de lire ou relire le feuilleton depuis le début :cliquez sur :
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1 9 6 2- (Première partie.)
L’année de mes seize ans.
Une année qui sera peu visible dans mon avenir personnel. Une de celles qui s’impriment peu dans la mémoire, ses souvenirs mélangés à ceux des années environnantes. Une année routine sans aspérité sans grande joie ni grande douleur. Mais cependant en 1962, autour de moi, beaucoup de chamboulements en France et dans le monde. Mais cela pour l’instant ne me touche guère. Je n’en serai conscient que dans bien plus tard.
Ma troisième année d’internat. Je termine la classe de seconde commerciale. Depuis la rentrée dernière le jeudi après midi est libre. Je peux sortir maintenant, avec autorisation parentale et tout et tout, pointage minutieux par les pions à la sortie et à la rentrée. Départ à 14 heures, retour à 19 heures avant le repas. . La plupart de mes camarades, s’ils ne disputent pas un match, de foot ou de rugby au stade Porchefontaine ou Montbauron, passent leur temps libre au dehors du collège, au café. Ils jouent aux cartes, aux baby foot, au flipper, ils discutent, s’engueulent, boivent, même si la protection des mineurs veille.
Moi, je n’aime pas du tout cette façon de dépenser son temps libre. Le jeu a toujours été pour moi d’un ennui mortel. Je vais donc, seul, me promener. La solitude ne me pèse pas, au contraire. Je vais au cinéma, traîne dans Versailles son parc et ses beaux hôtels , ou marche à travers le bois des fosses jusqu’à Buc faire la bise à ma Tante et surtout manger de son succulent gâteau au chocolat.
Je prends aussi le train à la gare rive gauche pour Paris. Je visite des musées, des expositions. Il m’arrive d’aller à la comédie Française en matinée à une de ces places au poulailler délivrées en dernière minute et à petit prix.
J’’y vois entre autre : Jacques Charon, François Chaumette, jean Piat, la belle Claude Winter, mais aussi et surtout celle dont la voix cristalline et la beauté me donne le frisson, la toute jeune pensionnaire Geneviève Casile. On la voit d'ailleurs souvent à la télèvision...
Je suis un grand utilisateur des livres de la bibliothèque du collège. J’en ai toujours un sur moi pendant ces virades du jeudi après midi.
Tout cela me passionne plus que de taper sur un flipper et faire tilt…..
Le vendredi matin, parmi les rugbymans du lycée qui ont disputé des matchs la veille ,beaucoup sont éclopés. Les absences sont nombreuses et les profs râlent.
Parmi mes professeurs un seul me laissera un souvenir indélébile, il s’agit de Monsieur Boiné, Maurice son prénom comme celui de mon père. Il faut dire que je suis ses cours depuis la classe de troisième, et, je ne le sais pas encore, il sera pour cinq années consécutives mon professeur de Français. C’est cette longévité, peut être, mais surtout la personnalité même de Monsieur Boiné qui me marquera.
C’est un homme en fin de quarantaine, long, maigre, raide dans un éternel costume gris, cravaté de rouge. Un long visage émacié, un nez épaté ; une bouche au rictus permanent. Une voie éraillée et sèche. Il ressort de ce personnage, une raideur ascétique un calme sévère et maîtrisé. Une présence forte.
Je ne serais jamais témoin pendant ses cours du moindre début de chahut. Une autorité naturelle émane de lui. Il lui suffit de redresser sa tête et de regarder la classe de son noir regard perçant pour que cesse toute velléité de turbulence. Il n’est pas craint mais respecté. Ses cours ne sont pas dirigistes. Chacun de nous peut s’exprimer, mais à bon escient et dans le bon ordre. Il est apprécié de tous autant des élèves que des autres professeurs, même s’il reste un peu à l’écart, secret, un peu hautain. Il sert de référence, tenu par ses confrères comme étant un de ces vieux enseignants de gauche encore à cheval sur les principes sacrés de l’enseignement laïc. Monsieur Boiné vit avec sa femme et sa mère, dans une petite maison à deux pas du collège. Il m’est arrivé plusieurs fois d’aller chez lui pour rendre ou chercher un livre, un exposé.
J’ai l’impression que malgré sons sens aigu de l’équité, Monsieur Boiné m’aime bien. Je suis parmi ses bons élèves, en permanence dans les cinq meilleurs et de temps en temps le premier et tout au moins l’un de ses plus assidus.
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A SUIVRE : Jeudi prochain : 1962 (seconde partie ).
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