AN PAR AN, Chronique d'une jeunesse drouaise.
J'ai fait le pari de raconter une vie, annèe par année. La chronique
d'une vie drouaise, ou plutôt d'une jeunesse drouaise :de 1946 à 1967. Chaque semaine, une année.....
J'y raconte mon enfance à Dreux, mais je m'attache surtout à décrire tout ce que j'ai pu observer dans la vie drouaise de l'époque...
Les personnes, les lieux, l'histoire et les petites histoires drouaises, des portraits, des atmosphéres, des anecdotes. , bref, tout ce qui fait le sel d'une vie et fournit la mémoire
en souvenirs de toutes sortes..et que peut être certains Drouais reconnaîtront..
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1 9 5 9- La pension
(première Partie.)
On a bien tort de se mettre à écrire ses mémoires quand on commence à perdre la sienne". (Général Albert de
Vaulgrenant)
A N P A R A N
DEUXIEME TOME
1959 – 1970.
En cette belle matinée d’octobre le train à vapeur, en cahotant et crachotant m’éloigne de mon enfance, et m’entraîne vers mon adolescence.
Cela je ne le sais pas encore et pourtant je
sens que tout va changer pour moi. Dans le couloir de ce wagon à compartiments, les coudes sur la fenêtre ouverte, la tête en dehors et les cheveux
au vent, je regarde le paysage ,le cerveau vide et le ventre serré. Il fait beau, mais il fait froid. Les champs labourés encore recouverts du givre
de la nuit brillent au soleil d’Automne. Le vent glacial me pique autant que les escarbilles que m’envoie la fumée âcre et noire de la loco à vapeur poussive. Derrière moi dans le compartiment il
y a mes parents et surtout ma valise. Ce n’est pas une valise pour partir en vacances ou en colonie de vacance. Il ne s’agit pas de vacances du tout, mais de pension. Rien qu’à penser à ce mot
« pension » mon estomac se noue douloureusement.
La plupart de mes camarades de l’école primaire Ferdinand Buisson de Dreux que je viens de quitter entrent aussi dans une nouvelle ère de leur existence. Certains ont reçu en cadeau
pour le certificat d’études une magnifique mobylette bleue. Oh ce n’est pas pour se promener mais pour se rendre au centre d’apprentissage et chez un patron. Eh oui, ils ont quatorze ans et
commencent déjà à travailler.
Par rapport à eux il paraît que j’ai de la
chance : Je vais continuer à étudier. Oui, mais eux, ils restent chez leurs parents.
Comme quatre de mes camarades j’ai réussi un
concours pour prendre en route le train du secondaire c'est-à-dire arriver en classe de quatrième en ayant laissé de coté la sixième et la cinquième. Mais cela ne nous donne pas droit à la voie
« royale », c'est-à-dire la quatrième « moderne » ou « classique ». Nous sommes cantonnés dans la filière « technique ». Mes camarades vont en sections
industrielles à Creil ou à Evreux. Pour moi ce sera la section études comptables et commerciale du Collège National Technique et Moderne lycée Jules Ferry à Versailles. Un titre ronflant qui
impressionne le gamin de tout juste treize ans que je suis.
A l’arrivée du
train à la gare Versailles chantiers, mon oncle Gilbert vient nous chercher en voiture. Il nous amène à Buc à trois kilomètres. C’est lui et ma tante Cécelle, la sœur de Maman qui
seront mes correspondants en cas de problèmes à la pension.
Le repas de midi est difficile à avaler pour
moi car l’angoisse m’étreint au fur et à mesure qu’approche l’heure fatidique.
Et pourtant le début de cet après-midi de Dimanche est très animé à Buc.
Dans la rue
passe une course cycliste « Le critérium des as ». Il s’agit d’une course contre la montre dont le départ, toutes les trois minutes, coureur par coureur a lieu, c’est très curieux,
devant l’entrée de mon Lycée.
Cette course, entraîne les coureurs par les côtes de la vallée de Chevreuse et après environ 80 kilomètres à la « cipale « (vélodrome municipal) de Vincennes. La course est en partie
relayée en noir et blanc par la télévision. Mes parents n’ont pas encore de téléviseur. Je suis, malgré ma fébrilité, captivé par l’écran du poste que possède mon oncle, le veinard. Mais quand le
départ d’un coureur connu est annoncé, nous sortons sur le trottoir pour l’apercevoir et l’applaudir. Comme la rue Louis Blériot monte assez durement, les coureurs ne sont pas en pleine vitesse
et nous avons un peu de temps pour les voir passer les uns après les autres. Je vois ainsi Jacques Anquetil (Qui gagnera l’épreuve) et Louison Bobet, « vas y Bobet « qui vient de
gagner coup sur coup trois tours de France.
Je ne sais pas encore que cette fameuse « cipale »qui reçoit encore l’arrivée du Tour de France à Vincennes portera plus tard le nom de « vélodrome Jacques
Anquetil. »
-« Bon et bien il est bientôt six heures il faut y aller…. »
L’oncle Gilbert nous conduit au Collège, moi
et mes parents.
Le temps va
s’accélérer.
Tout est nouveau pour moi. Je suis emporté
par les événements comme un petit bateau en papier plié sur l’eau d’un caniveau J’ai l’impression que tout se passe en dehors de moi en petites scénettes d’une pièce décousues d’un théâtre rituel dans lesquelles je suis plus spectateur qu’acteur : .
-Ma valise ouverte sur un lit, un jeune pion
souriant et décontracté contrôle mollement le contenu en le comparant à la liste du trousseau de vêtements et d’accessoires demandée par le
l’administration du Collège. Maman est rassurée, elle n’a rien oublié. Même pas le béret noir, pourtant sur la liste, mais que ne porterais jamais.
-Le départ de mes parents dans la voiture de
l’oncle Gilbert.
(Je ne l’apprendrai qu’une semaine plus tard : A cent mètres de là, la
voiture de Gilbert à eu un accrochage avec un autre véhicule. Peu de dégât, juste un peu de tôle froissée. Mais maman a subi le coup du lapin. Elle souffrira longtemps du cou. Elle en rejettera
la responsabilité (même trente ans plus tard) sur le pauvre Gilbert.
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A SUIVRE : Jeudi prochain : 1959 (seconde partie).
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